Seigneur, à quoi m'as-tu abandonné !
Signori, à chì m'hai lacatu !
.
.
.
Je ne peux pas m'empêcher de penser
à ces femmes qui avant moi et après
moi font la tentative de l'amour avec
l'interdit pour seul mirage je n'arrive
plus à en définir les reflets tant je
m'accouche de mon interdit et me laisse
respirer au vent des jardins public
hôtels à ciel ouvert bedrooms pour
misérables des cœurs et du cri d'aimer
sans livret de famille.
.
.
.
Ùn mi possu 'mpidiscia di pinsà
à quiddi donni chì nanz' à mè è
dopu pròvani l'amori cù l'intardettu
par sola 'llusioni ùn la di faciu
à definisciani i sperii talmenti
mi parturiscu da lu me intardettu mi lacu
rispirà à l'aria di li ciardini publichi
ostelli scuparti bedrooms pà
i povari 'llu cori, u brionu d'amà
senza librettu di famidda.
.
.
.
.
.
Il faudra maintenant tout inventer
pour rencontrer l'instant d'aimer il me
faudra te dire sans introduction ce qui
ne peut avoir aucune preuve si ce n'est
le verbe se souvenir de chaque instant
balbutiements promesses de moi à toi
et inversement il faudra s'imprimer de
toute terre que nous aurons frôlée avec
la peur comme compagne de route
peur de se perdre de nous perdre il
n'y a de preuve contre le doute que
nos pas qui se chevauchent dans la
réinvention du prisme des couleurs il
n'y a d'amour que le doute qui grandit
et se repose dans les certitudes du passé.
.
.
.
Ci vularà avali d'invintà tuttu
par scuntrà l'istanti d'amà mi
ci hà da vulà à dìtti senza liminariu ciò
ch'ùn pò avè prova s'iddu ùn hè
u verbu sunvenasi d'ugni stunda
balbaticheri prumessi da tè à mè
è torna ci hà vulè à imprimàssi
d'ugni tarra ch'e n'avaremu toccu cù
a paura par cumpagna di strada
paura di perdasi di perdaci ùn
ci hè prova contr'à u dubbitu
che i nosci passa chì si suprapònini
'n a riinvinzioni di u prismu 'lli culori
ùn ci hè d'amori chè u dubbitu chì cresci
è s'arriposa in i certitùdini 'llu passatu.
.
.
.
.
in --- Le Jazz des oliviers ---Éditions du Tell --- 2010
.
.
trad. Stefanu Cesari
.
.
… Je partis de chez vous à la lumière des torches. J'embarquais, je partis.
… Vous ne savez plus rien de moi, vous ne pouvez me faire signe. Je dure devant la mer comme une femme qui a toute sa force mais j'ai coupé ma chevelure.
… Ils disent : Nous avons entendu parler d'elle. Ils s'éloignent de moi.
… Parfois ils me demandent. Je leur cède mon corps, emportée loin de vous, je ne suis plus à bord, quoiqu'il advienne, eux scrutent ma beauté, allongés sur le sol de ma chambre. Je leur dis : Je vis seule. Je m'endors.
… Je construis votre absence. Je pèse votre absence. Je l'entends. Je l'étreins. Vous êtes le néant dont je suis affolée. Le soir arrive, le vent lui manque. À l'extrême de la mer, l'horizon redevient pacifié.
… Je suis vivante, brûlée à la douleur mais vivante. Je pleure sans violence.
.
.
.
.
.
... Partisti d'indè vo à a luci di i fiàcculi. Imbarcaiu, partisti.
...Ùn sapeti più nienti di mè, ùn mi pudeti fà segnu. Duru davant'à u mari com'è una donna ch' hà tutta a so forza ma mi socu taddatu a capiddera.
... Dìcini : N'emu intesu parlà, d'idda. S'alluntanìghjani di mè.
... Certi volti mi dumàndani. Li cedu u me corpu, purtata à longa da vo, ùn socu più à bordu, veni ciò chì veni, iddi mi spiculìghjani a billezza, stesi in tarra 'n a me càmara. Li dicu : campu sola. M'addurmentu.
... Custruiscu a voscia assenza. Pesu a voscia assenza. A sentu. A mi stringhju. Seti u nianti, chì ni socu spersa. Ghjunghji a sera, li manca u ventu. À u stremu 'llu mari, l'urizonti riduventa pacificatu.
… Socu viva, brusgiata à u dulori ma viva. Piengu senza viulenza.
.
.
.
in --- Le Livre des recels --- Flammarion --- 2011
.
.
.
trad Stefanu Cesari
.
.
.
Au temps du choléra
.
.
Nous sommes face à face,
dos tourné aux malheurs du monde.
Derrière nos yeux et nos rideaux clos
d'un coup la vague de chaleur
et la guerre déferlent.
C'est la chaleur qui s'apaisera en premier,
un vent léger
ne ramènera pas
les adolescents abattus,
ni ne rafraîchira
le courroux des vivants.
Même s'il tarde
le feu viendra,
des torrents d'eau ne sauraient éteindre, ect.
Nos mains, elles aussi,
n'atteignent que nos corps :
nous sommes une petite foule
poussée à mordre, à agripper,
à nous barricader au lit
alors que dans l'ozone sur nos têtes
un sourire moqueur s'élargit.
.
.
.
.
.
In Tempu 'llu cholerà
.
.
Semu faccia è faccia,
spinu vultatu à i guai 'llu mondu.
Daret'à i nosci ochja chjusi è i tindona
d'un colpu a favugna
è a guerra subbàcani.
Hè a favugna prima chì calarà,
un trattu lebbiu
ùn farà vultà
l'aduliscenti caduti,
nemmancu rinfriscarà
l'ira di i vivi.
Ancu s'iddu trica
u focu vinarà,
lanci d'acqua ùn la farìani à spinghja, ecc.
I nosci mani, puri
ùn attìnghjani chè à i nosci corpa :
semu un pìcculu stolu
impuntatu à morda, ad azzingàssi
à sarràcci in lettu
inveci chì 'n l'ozona da supr' à no
s'allarga un surrisu chì ci beffa.
.
.
.
In --- Soirée Ordinaire --- ed. Al Manar --- 2011
.
.
.
flambée sur flambée :
les coups de reins ouvrent la trappe
avec une force d’acier
.
au creux du choc
la robe délacée s’effondre (les fils sont pourpres
et ne résistent pas)
.
à terre dessine une tache –
la même, sur la peau, marquée au fer brûlant
.
.
.
fiammata nant' à fiammata :
i colpa di reni aprini a catarazza
cù una forza d'acciaghju
.
'n a curva 'llu chjoccu
a coda slacciata suffala (i fili sò pùrpuri
è ùn risìstini micca)
.
in tarra disegna una tacca -
a stessa, nant'à a peddi, segnata à u farru
.
.
.
.
.
au plus fort de l’étreinte quand elle n’est pas voulue
le ciel se désengage et perd pied
.
comme la chair dans l’étau de la chair
vire au rouge
et par longs suintements s’égoutte
.
la pluie ne pourra rien laver
de ce qui s’incendie puis coule à la dérive
.
sur l’échancrure des jambes
.
.
.
à u più rudu di a strinta quand'idda ùn hè micca vulsuta
u celi si ritira è sprafonda
.
com'è a carri in u morsu di a carri
veni russa
è 'ncù longhi sudamenti sgutta
.
u piòvitu ùn pudarà lavà nienti
di ciò chì s'incendia po' scurri à a diriva
.
nant'à a snudatura 'lli ghjambi
.
.
.
.
in --- Par Obole – ed. Cheyne -
.
.
.
.
Han stod en tidig morgon i köket och drack ett glass vatten.
Ju mera han drack, dess större blev törsten, och köket mörknade
som hade han stått i en tunnel utan en synlig utgång.
Mörker trycktes med vattnet fylla hans kropp och tynga den,
fråå gatan utanför hördes ett rytmiskt dån som om en okånd fara
våntade när nu åter skulle stiga in i sitt vardagsliv.
Han ställde försiktigt ned glaset, gick tillbaka till sängen
och lade sig om om han bländats i mörker,
glort en lång resa och aldrig återvänt.
.
.
.
.
.
Un jour où il se trouvait de bon matin dans la cuisine, il but un verre d'eau.
Plus il buvait, plus il avait soif, et la cuisine s'assombrissait comme
s'il s'était trouvé dans un tunnel sans issue apparente. Les ombres
épaississaient pendant que l'eau emplissait son corps, l'alourdissait.
Du dehors de la rue, on entendit un grondement rythmique semblable
à celui d'un danger inconnu qui attendait le moment où il entrerait
à nouveau dans sa vie quotidienne. Il reposa le verre avec précaution,
retourna se coucher et s'étendit comme s'il se mêlait aux ombres,
comme s'il avait fait un long voyage dont il n'était jamais revenu.
.
.
.
.
.
Un ghjornu ch'iddu era di bon' ora 'n a cucina, si biti un bichjer' d'acqua.
Più biia, più t'avia a siti, è a cucina s'adumbraia com'è
s'iddu s'era trovu 'n un tunnellu senza sciuta. L'umbri
s'allargaiani mentri chì l'acqua l'impiia u corpu, li pisaia.
Da in fora da u chjassu s'intesi un ronzu ritmicu pari
à quiddu d'un prigulu scunnisciutu chì aspittaia d'entra
torra in a so vita cutidiana. Riposti u bichjeri pianamenti,
andeti à chjinàssi è si stesi com'è par buliàssi à l'umbri,
com'è s'iddu avissi fattu un longu viaghju, senz'essa vultatu mai.
.
.
.
in --- Dehors ---- ed. Arfuyen ---- 2007
.
.
.
trad. Pierre Grouix
.
.
.
.
Envols d’oiseaux –
autant de tintements que de solitudes :
voix mêlées chacune à part soi.
Ablutions d’oiseaux dans la récolte
des premières heures !
– Rien ne frémit sous le chant des martinets –
D’un vol aigu,
ils labourent les sillons blancs du ciel
fêtent l’espace
tandis que nous l’apprenons.
.
.
.
Pisata d'aceddi -
tantu chjocchi chè sulitùdini :
boci mischiati, ugnuna à parti soia
Rinfrinscati d'aceddi in a raccolta
di i primi ori !
- Nienti tremma sutt'à u cantu di i pitricaghji -
D'un bolu acutu
lavurighjani i sulca bianchi di u celi
affestani u spaziu
mentri chè no u 'mparemu
.
.
.
.
.
.
Le froid dessine
chaque nerf
chaque veine
dessille les yeux
épaissit encore un peu le pourpre
des lèvres –
lucidité de la peau –
Les organes pelotonnés dans le ventre
tout à coup vifs dans le vent –
j’ai les mains retroussées contre l’aine, le sang surchargé de marches sans ciels – la gorge hérissée d’un mot d’amour.
.
.
.
U fritu dissegna
ugni narbu
ugni vena
mezapri l'ochja
spissisci torra un pocu a pùrpura
di i labbra –
lucidità di a peddi –
L'organi acciucciati 'n u ventri
d'un colpu vivi 'n u ventu –
t'aghju i mani svultati contr'à a langunaghja, u sangu
tracarcu di marchji senza celi – a cannedda inzirita
d'una parola d'amori.
.
.
.
in --- Une Neige et des Baisers exacts --- éd. Cheyne --- 2010
.
.
.
tr. Stefanu Cesari
.
.
Nous n'avons pas plus de pouvoir s'attardant sur les décisions de notre vie que nous n'en possédons sur nos rêves à travers notre sommeil. À peine plus. Réalité quasi sans choix, assaillante, assaillie, qui exténuée se dépose, puis se dresse, se veut fruit de chaos et de soin offert à notre oscillation. Caravane délectable. Ainsi va-t-on.
Soudain nous surprend l'ordre de halte et le signal d'obliquer. C'est l'ouvrage.
Comment ramener au liseron du souffle l'hémorragie indescriptible ? Vaine question, même si un tel ascendant avait eu son heure dans nos maisons dissimulées. Il n'est pire simplicité que celle qui nous oblige à chercher refuge. Pourtant la terre où nous désirons n'est pas la terre qui nous enfouit. Le marteau qui l'affirme n'a pas le coup crépusculaire. Ô mon avoir-fantôme, qu'ils se couchent et qu'ils dorment ; la chouette les initiera ! Et maintenant, c'est moi qui vais t'habiller, mon amour.
Nous marcherons, nous marcherons, nous exerçant encore à une borne injustifiable à distance heureuse de nous. Nos traces prennent langue.
.
.
.
.
.
Ùn emu di più puteri à pisà nant'à i dicisioni di a noscia vita ch'e n' emu nant'à i nosci sonnia à traver'à l'arriposu. Appena di più. Rialità guasgi senza scelta, assaltanti, assaltata, è chì spussata si poni, po' si drizza, si dici fruttu di chaos è di primura offertu à a noscia pindenza. Caravana diletta. Cussì si và.
Impruvisu ci chjappa l'ordini di susta è u segnu di trincà. Hè l'opara.
Comu turrà à a trammula di u suffiu a dissangunata indiscrivibuli ? Quistioni vana, ancu s'e un tal ascindenti t'essi avutu a so ora 'n i nosci casi ascosti. Ùn ci hè peghju simplicità chè quidda chì ci ubblichighja à circà l'aggrundu. Purtantu a tarra indò chè no bramemu ùn hè a tarra chì ci infossa. U marteddu chì a dici ùn hà u colpu crepusculari. O' lu me avè-fandoniu, ch'iddi si stendini è ch'iddi dormini ; i 'mpunarà a malacedda ! Ora, socu eu chì t'aghju da vesta, amori.
Marchjaremu, marchjaremu, asircittenduci torra à un tarmini inghjustifichevuli, à distanza cunsulenti di no. I nosci tracci tròvani lingua.
.
.
.
in --- La Nuit Talismanique qui brillait dans son cercle --- 1972
.
.
tr Stefanu Cesari©
.
.
Vurrìati sparta, un pocu.
pralungà più indà di u sonniu, custruitu à a dura in a notti, a so strema fini.
ma qual' ci hà da essa
par tenavi cumpagnìa.
purtà u segnu sin' à l'ora di meziornu.
.
vidaremu
.
à travers'à quiddi mani chì si pònini,
travaddendu materia. qualissa ?
d'un' inasistenza
daret'à l'ossa
un culori sbiadititu è u trostu.
corpu. chì chirchinnighja è chjama
à travers'à a lana si vularà stringhja
l'èsitu brevu com'è una peddi
.
.
..
.
.
Vous voudriez partager
poursuivre au delà du rêve péniblement construit dans la nuit,
sur son extrême fin.
mais qui vous accompagnera au delà.
portera le présage jusqu'aux heures de midi.
.
nous verrons
.
au travers des mains posées,
travaillant une matière. quelle ?
derrière les os diaphanes et la laine.
un corps. appelle.
on voudra saisir ce court espace,
l'embrasure
comme une peau
.
.
.
Stefanu Cesari
.